diabetologyinstitute.com | 2025-07-13 à 11:15
Le président américain Donald Trump a convié cette semaine à Washington les dirigeants de cinq pays africains pour un mini-sommet. Les analystes suggèrent que la réunion était une man?uvre calculée, car l'administration Trump cherche à obtenir un meilleur accès aux ressources minérales de l'Afrique pour soutenir son programme de développement industriel.
NAIROBI, 13 juillet (Xinhua) -- Le président américain Donald Trump a convié cette semaine à Washington les dirigeants de cinq pays africains (Gabon, Guinée-Bissau, Liberia, Mauritanie et Sénégal) pour un mini-sommet axé sur le commerce, l'investissement et la sécurité.
Selon des observateurs, ces pays étant soumis à des droits de douane de 10% sur leurs exportations vers les Etats-Unis, l'administration Trump a cherché à faire pression sur eux en leur imposant des conditions strictes, alors que les dirigeants africains espéraient probablement négocier des conditions commerciales plus favorables.
En plus de limiter leur temps de parole et de se moquer des compétences en anglais du président libérien, M. Trump aurait fait pression sur les dirigeants pour qu'ils acceptent les immigrés clandestins expulsés par les Etats-Unis. Les analystes suggèrent également que la réunion était une man?uvre calculée, car l'administration Trump cherche à obtenir un meilleur accès aux ressources minérales de l'Afrique pour soutenir son programme de développement industriel.
Lors de la rencontre mercredi, M. Trump a affirmé que la politique américaine vers l'Afrique était en train d'évoluer "de l'aide au commerce", en expliquant qu'à long terme, "cela sera bien plus efficace, durable et bénéfique que tout ce que nous pourrions faire ensemble".
Derrière ce discours, nombreux sont ceux qui y voient une stratégie explicite d'accaparement des richesses africaines, en particulier ses ressources minières essentielles.
"Trump vient de se rendre compte que c'est une grave erreur d'ignorer l'Afrique avec ses ressources minières et énergétiques", a noté Cheikh Tidiane Ndiaye, ancien rédacteur en chef de l'Agence de presse sénégalaise.
Le Gabon détient environ un quart des réserves mondiales connues de manganèse, le Sénégal est riche en pétrole, gaz naturel et or, tandis que la Mauritanie possède des gisements d'uranium... Autant de ressources cruciales pour l'industrie mondiale.
La véritable nature de la réunion a été ainsi révélée, indique un éditorial intitulé "Le sommet africain de Trump était un cours magistral de théatre colonial moderne" publié par la cha?ne d'information Al Jazeera. "L'Afrique a été présentée non pas comme un continent de nations souveraines, mais comme une riche étendue de ressources (...) Ce n'était pas un dialogue, mais une démonstration de domination : une mise en scène dans laquelle Trump avait écrit le scénario et les chefs d'Etat africains étaient relégués à des r?les subalternes", selon l'éditorialiste Tafi Mhaka.
UN SOMMET POUR FORCER L'ACCEPTATION DES IMMIGRES EXPULSES
Un autre objectif majeur du sommet a été de faire pression sur les dirigeants africains pour qu'ils acceptent les immigrés expulsés des Etats-Unis.
Depuis janvier, l'administration Trump a intensifié sa campagne d'expulsions d'immigrés en situation irrégulière, allant jusqu'à chercher à les rediriger vers des "pays tiers" lorsque leurs pays d'origine les refusent ou tardent à les reprendre.
Pour l'instant, le Gabon, la Guinée-Bissau, le Liberia, la Mauritanie et le Sénégal n'ont pas officiellement répondu à cette demande. Toutefois, des sources indiquent que le Soudan du Sud a déjà re?u, début juillet, huit immigrés expulsés des Etats-Unis - preuve que cette politique est déjà en marche sur le continent.
Dans le même temps, le Nigeria a annoncé jeudi sa position ferme contre l'acceptation des ressortissants vénézuéliens expulsés, dont certains sortent directement de prison.
Yusuf Tuggar, ministre nigérian des Affaires étrangères, a déclaré que Washington exer?ait une "pression considérable" sur les pays africains, y compris le Nigeria. Avec une population de plus de 200 millions d'habitants, le Nigeria n'est pas en mesure d'accueillir des expulsés étrangers, en particulier ceux qui ont des antécédents criminels potentiels, a-t-il noté.
UNE ARROGANCE IMPERIALE
Lors de la rencontre à Washington, Donald Trump s'est étonné de son "bon anglais" du président libérien Joseph Boakai, demandant même où son interlocuteur avait appris à le parler "si magnifiquement", et en particulier si c'était "au Liberia".
Une remarque per?ue comme insultante dans cette nation fondée au XIXe siècle par d'anciens esclaves américains affranchis et dont la langue officielle est l'anglais, comme dans d'autres pays africains.
"Il est décevant qu'un leader mondial ne sache pas quelle est la langue officielle d'un pays qui a des liens historiques aussi profonds avec les Etats-Unis", a noté Sam Yates, un Libérien vivant au Nigeria, sur Facebook. "Est-ce que Trump pense que nous ne parlons que des langues de 'la jungle' ? L'anglais est enseigné dans les écoles à travers l'Afrique, souvent à un niveau très élevé".
Certains internautes ont fait le lien entre les commentaires de M. Trump et les questions plus générales de la perception de l'Afrique par les Occidentaux, affirmant que ces remarques soulignaient la tendance de certains Occidentaux à considérer l'Afrique sous l'angle de la dépendance à l'aide ou de l'exotisme culturel, plut?t que comme un continent doté de sociétés modernes et diversifiées et de populations éduquées.
"Il ne s'agit pas d'un compliment, mais d'une insulte à peine voilée. Il témoigne d'un manque fondamental de compréhension et de respect pour l'intelligence et l'éducation africaines", a écrit Richard Donkor, un utilisateur de X au Ghana.
Plus encore, M. Trump a manifesté de l'impatience pendant l'intervention du président mauritanien Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani, allant jusqu'à lui demander d'abréger son discours.
Une photo de groupe des six chefs d'Etat à la Maison Blanche a aussi fait le tour des réseaux sociaux : les cinq dirigeants africains se tiennent debout, alignés, tandis que M. Trump est confortablement assis derrière son bureau.
Foday Massaquoi, président du Congrès pour le changement démocratique - Conseil des patriotes, une formation d'opposition du Liberia, a estimé que l'objectif de la réunion à la Maison Blanche était mal orienté, soulignant que les remarques de M. Trump étaient "irrespectueuses".
Il a également noté le manque de respect du président américain envers les dirigeants africains. "Le président Trump s'est montré condescendant; il a été très irrespectueux envers les dirigeants africains (...) et cela prouve que l'Occident ne nous prend pas au sérieux en tant qu'Africains", a-t-il déploré.